L’interprétation du problème climatique ne peut être réduite à des données scientifiques isolées. Aviva Chomsky, dans un entretien datant de 2022, souligne que les enjeux de justice sociale et éthiques sont centraux pour une approche efficace. La science, bien qu’indispensable, ne peut seule résoudre le défi climatique. Elle est à ses limites lorsqu’il s’agit d’aborder les causes profondes du problème : un système économique mondial en crise, marqué par des inégalités criantes et une exploitation systémique des ressources naturelles.

Chomsky pointe du doigt l’obsession technocratique qui a dominé le débat public, où les experts sont perçus comme les seuls capables de résoudre la crise. Cependant, cette vision éloigne les citoyens des véritables solutions, qui reposent sur un changement structurel du mode de production et de consommation. Les politiques climatiques américaines, notamment sous l’administration Biden, illustrent cette impuissance : malgré des déclarations opportunes, les actions concrètes manquent cruellement. Le recours à des énergies alternatives est souvent présenté comme une panacée, mais il ne remplace pas la nécessité d’une réduction drastique de la surconsommation.

L’auteure critique également l’illusion d’un « développement durable » qui masque le maintien de systèmes prédateurs. Les initiatives telles que les voitures électriques ou l’industrie du gaz naturel sont souvent des outils de réassurance sans impact réel. L’exemple des SUV, qui dominent les ventes aux États-Unis, montre combien le capitalisme freine toute transformation profonde. Les solutions doivent passer par une redistribution équitable des ressources et une priorisation des besoins humains fondamentaux, au détriment des profits individuels.

Chomsky insiste sur l’importance de la lutte des classes et de l’égalité mondiale dans les décisions climatiques. Les pays industrialisés, responsables des émissions les plus élevées, imposent un coût colossal aux populations vulnérables du Sud. Cette injustice structurelle ne peut être résolue par des mesures techniques seules ; elle exige une révolution de l’imaginaire collectif et une mobilisation citoyenne forte.

Bien que la science fournisse les outils nécessaires, c’est la volonté politique qui déterminera le succès d’une transition écologique. L’auteure conclut par un message d’espoir : la crise climatique peut être surmontée si l’on ose restructurer l’économie et repenser les priorités sociales. Mais cela exige une prise de conscience collective, loin des discours creux et des solutions superficielles.

Source originale : Current Affairs, Aviva Chomsky (2022)